• La Compassion

     (Enseignement de Guendune Rinpoché) Août 1997 – Dhagpo Kagyu Ling -


    LA COMPASSION :
    Il ne faut pas confondre condescendance et compassion. La compassion n’est pas un mouvement des yeux qui se portent vers le bon peuple qui souffre et auquel nous faisons l’ aumône de notre attention et de nos bienfaits. Ca, c’est de la condescendance qui s’appuie sur l’orgueil, sur un sentiment de supériorité. Ce n’est pas de la compassion. La compassion est un sentiment universel qui naît de la prise de conscience de la nature défectueuse, douloureuse, du cycle des existences conditionnées. Lorsque nous réalisons cela de l’intérieur, du plus profond de notre être, s’élève un sentiment d’immense compassion face à la souffrance essentielle de tous les êtres – celle de l’ignorance, celle des émotions qui naissent de cette ignorance – et à la douleur permanente qu’ils endurent. Ce sentiment de compassion n’est pas référentiel, il ne s’adresse pas à tel ou tel public, à telle ou telle personne, il n’a pas de limite. La condescendance, elle est limitée, puisque nous nous tournons vers une sorte d’auditoire avec l’idée qu’il nous renverra l’image agréable de quelqu’un de compassionné.

    Il y a donc une limitation parce que nous nous adressons à ce que nous concevons, à ce que nous voyons, à ce que nous pouvons toucher en quelque sorte, alors que la compassion est un sentiment universel venu de l’intérieur du cœur, qui rayonne et se diffuse dans l’espace tout entier. Lorsqu’ elle n’est pas référentielle, elle a pour objet tous les êtres, même ceux que nous n’avons jamais vus, même ceux que nous ne verrons jamais, même ceux que nous n’imaginons peut-être pas.

    Il n’y a de limite et, lorsque cette compassion profonde est née, la pratique est naturelle : nous savons que c’est à travers la méditation et la pratique que nous obtiendrons la liberté et la capacité d’aider les êtres. Ainsi, le sentiment profond de compassion n’a rien à voir avec la condescendance, nous ne nous sentons pas supérieur, nous sommes touchés par la souffrance des êtres et motivés à faire quelque chose pour éradiquer cette souffrance ; il n’ya pas de sentiments de supériorité, il n’y a pas de privilèges accordés à certain cercle d’êtres, mais au contraire l’envi de dédier l’énergie du corps, de la parole et de l’esprit à tous les êtres sans exception, où qu’ils soient, sans limite de temps ni d’espace, de façon à leur offrir à tous les outils de la libération.

    Nous pouvons également mettre en avant la différence qu’il y entre la compassion et l’amour ordinaires et la compassion et l’amour d’un bodhisattva, d’un être qui s’est dédié à l’éveil de tous les êtres. La différence est dans la portée de cet amour et de cette compassion. Aimer, protéger, soutenir ceux qui nous sont proches, notre famille, nos amis, ceux que nous aimons, c’est facile, tout le monde fait cela. Ce n’est pas une compassion de boddhisattva, c’est une compassion ordinaire qui, en fait, part d’un sentiment de propriété. Ce « troupeau », amis, famille, etc., nous appartient et nous devons donc en prendre soin. C’est pour cela que nous l’aimons, que nous les soutenons, les protégeons et les défendons. Aussi longtemps qu’ils sont dans le droit fil de nos idées et ne s’en écartent pas de notre point de vue, nous les aimons, mais s’ils s’écartent de notre vision des choses, ils reçoivent notre mépris et notre colère. C’est une forme de compassion très ordinaire, entachée d’un sentiment de possession ou de désir, d’exclusivité et de partialité.

    L’amour et la compassion tels que le dharma les entend, ceux d’un boddhisattva, sont totalement différents. Ils n’incluent pas de notion de propriété. Ces êtres sont l’objet de notre intention altruiste et de notre compassion, et tous les efforts faits pour les soulager ne nous appartiennent pas. Nous n’attendons rien en retour. Nous apportons ce soutien, nous exprimons cette compassion parce que, au plus profond de nous, nous avons été touchés par leur souffrance et nous avons envie profondément, universellement, sans faire de cas par cas, d’aider ces êtres à se libérer, à faire leur chemin vers l’éveil. Il n’y a pas de menace du genre : « Si vous ne suivez pas ma façon de voire les choses, vous serez exclus de ma compassion. » Cela ne peut pas fonctionner ainsi puisque cet amour et cette compassion s’adressent aussi bien à ceux qui sont dans la justesse et font leur chemin vers l’éveil qu’à ceux qui sont dans l’ignorance et souffrent à cause de cette ignorance.

    Il n’y a donc pas de barrière ni de limitation. L’amour et la compassion ordinaires font une différence entre ceux qui sont proches, qui se situent à l’intérieur du cercle et que nous aimons, et ceux qui sont en dehors du cercle, qui sont loin et que nous rejetons ou dédaignons, voire haïssons. Il y a une différence essentielle, et il ne faut pas confondre les deux aspects. Nous avons un peu tendance à dire : « Si j’aime les gens autour de moi, je suis un bodhisattva. » Non, il y a un espace limité, partial, dont il faut défaire les limites. Il faut se débarrasser de cette partialité entre proches et éloignés, entre les êtres aimés et les ennemies ou les indifférents, pour laisser parler ce sentiment profond, universel, de compassion qui est l’apanage d’un boddhisattva.

    Tous au long de ce chemin, nous rencontrons des difficultés, des personnes difficiles, des situations compliquées et, si nous pensons que tout sera facile et qu’il ne sera pas nécessaire d’avoir de temps en temps de la patience ou de faire de faire des compromis, notre chemins sera très douloureux. A tous les coins de rue, que nous rencontrerons quelqu’un qui nous créera un problème, une situation qui viendra faire obstacle, et si nous nous impatientons, si nous nous montrons très colérique, la progression sur le chemin sera interrompue à chaque fois.

    Nous créerons à nouveau du Karma et il sera vraiment difficile de progresser ; il faut donc nous armer de patience, développer cette qualité comme une sorte d’armure qui nous protégera sur le chemin et essayer de reconnaître l’obstacle non pas comme une difficulté mais comme une sollicitation, comme une sorte de défi à notre intelligence et à notre créativité. Nous pourrons alors recevoir l’obstacle ou la personne qui crée l’obstacle comme une indication de ce qui nous reste à faire et nous dire : « C’est vrai, je suis effectivement emporté par la colère et le désespoir, je m’énerve, je trépigne et je ne l’avais pas vu. Je pensais être quelqu’un de calme, de disponible, de courtois, et ma véritable nature, que j’avais bien cachée sous cette apparente civilité, se révèle grâce à vous. Merci ! Finalement, vous êtes l’égal de mon maître puisque vous mettez en avant mes défauts cachés et ce que j’ai à travailler. Je vous remercie donc. »

    Si nous pouvons adopter cette attitude, ne pas nous laisser emporter par la colère lorsqu’un obstacle apparaît et plus encore éprouver un sentiment de gratitude à l’égard de cet obstacle qui nous montre quelque chose qui n’avait pas été perçu et nous contraint à un effort d’intelligence, à faire fructifier des qualités non encore développées, nous sommes sur la bonne voie. Les obstacles ne seront plus des obstacles, mais au contraire des occasions d’enrichissement, et un sentiment de gratitude s’installera dans notre esprit pour ces obstacles, pour ces personnes difficiles, pour ces conflits qui s’élèvent, nous permettant de grandir et d’avancer.

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